Bonjour, bienvenue au Mooc, Villes africaines, environnement et enjeux de développement. La leçon d'aujourd'hui porte sur le profil sanitaire des populations. Confrontées à une urbanisation galopante, et non planifiée, les villes d'Afrique subsaharienne apparaissent comme des espaces à risques sanitaires multiples. Avec le concours de l'insalubrité ambiante, les fortes concentrations humaines et la densité et l'importance de l'habitat précaire apparaissent comme des caractéristiques épidémiologiques déterminantes pour les pathologies de promiscuité, et des facteurs aggravant dans les pathologies de pauvreté. Ainsi cette urbanisation engendre une situation d'épidémiologie nouvelle caractérisée par un cumul des classiques pathologies, infectieuses et parasitaires, des pays en développement, avec les pathologies dites des pays riches, comme les cardiopathies, le diabète, les cancers etc. Cette leçon dresse un tableau de l'état sanitaire des populations urbaines, nous ferons ressortir le cumul des charges que doivent supporter les populations des villes d'Afrique subsaharienne, les maladies transmissibles, les maladies non transmissibles, les affections nutritionnelles, les traumatismes. Et l'étude de la mortalité consistera à mettre en évidence le poids de la mortalité des enfants. Parmi les maladies transmissibles, le paludisme est la plus redoutée. C'est la principale maladie parasitaire, transmise par les piqûres des moustiques anophèles, infectés, qui sévit particulièrement en Afrique subsaharienne, qui est la principale zone endémique du Globe. En effet, pour l'année 2012, l'Organisation mondiale de la santé a estimé, au niveau mondial, à 207 millions le nombre de cas de paludisme ; et près de 80% de ces cas se sont produits en Afrique. Les enfants de moins de cinq ans paient le plus lourd tribut. Pendant la grossesse, le paludisme peut être la cause d'anémies graves, et peut provoquer une fausse couche, ou un mort-né. Il est aussi une cause de décès maternel. En plus du décès, la maladie peut avoir de graves conséquences sur le développement mental et physique de l'enfant. En effet, dans les zones endémiques, la maladie est l'une des principales causes du faible poids à la naissance, évitable chez les nouveaux nés, et un facteur important des décès néonatals. Chez l'adulte, il peut avoir des effets débilitants, nécessitant plusieurs jours d'arrêts de travail. Les études entomologiques disponibles révèlent que la dynamique de la transmission se fait selon les principales modalités suivantes. Une transmission continue dans les zones forestières, et une transmission saisonnière, longue ou courte, selon les latitudes. Les données collectées au cours des enquêtes démographiques et de santé, à indicateurs multiples, ont permis d'évaluer la prévalence, le recours au diagnostic et au traitement du paludisme. Celle-ci varie selon les pays ou les villes. Au Niger, 15% des enfants avaient eu de la fièvre, pour 68,1% des cas, les parents ont recherché des conseils ou des traitements auprès d'un établissement ou prestataire de santé. Parmi ces enfants ayant eu la fièvre, 29,9 % ont pris un traitement antipaludique. Dans 24,3 % des cas, les enfants ont été traités avec une combinaison thérapeutique à base d'artémisinine, recommandée par l'OMS. À Kinshasa, en République démocratique du Congo, 19,4 % des enfants enquêtés avaient eu de la fièvre, pour 73,9 % de ces cas les parents ont recherché des conseils ou des traitements auprès d'un établissement ou prestataire de santé. 38,1 % ont pris un traitement antipaludique, et seulement 6,8 % une CTA. La tuberculose, réputée vaincue, a réapparu, en lien avec l'épidémie de SIDA. C'est une maladie curable, la plupart du temps. Elle frappe les adultes, et est souvent associée à un état de malnutrition et à de mauvaises conditions de logement. Les données disponibles au niveau mondial ne nous renseignent pas sur la prévalence de la maladie selon le lieu de résidence. Selon l'OMS, en 2012, le taux de prévalence de la région Afrique était le plus élevé au monde, 303 pour 100 000 habitants ; et le taux de mortalité lié à la tuberculose sur les personnes séro-négatives au VIH était, de très loin, le plus élevé de l'ordre de 26 pour 100 000 habitants. Enfin, l'incidence de la tuberculose en Afrique, c'est-à -dire le nombre de nouveaux cas pour 100 000 personnes, après avoir été de 310 nouveaux cas en 2000, est en diminution, atteint en 2012 255 nouveaux cas. Les maladies sexuellement transmissibles, mal notifiées dans la plupart des pays, constituent un grave problème de santé publique. Parmi les MST, le VIH-SIDA occupe une place à part, liée à sa gravité et à sa propagation très rapide. Selon les données de l'OMS, sur le nombre de personnes vivant avec le SIDA, environ les sept dixièmes vivent en Afrique subsaharienne. Le présent tableau nous révèle une prévalence qui varie selon le sexe. De manière générale, les femmes sont les personnes les plus frappées par la pandémie du SIDA. Au Cameroun, 6,4% des femmes contre 3 % des hommes. En Côte d'Ivoire, 5,5 % des femmes contre 3 % des hommes. Il en est de même dans les villes, comme Yaoundé, Abidjan, où on a respectivement 3,6 % contre 0,4 %, et 2,5 % contre 0,1 %. Parmi les autres maladies transmissibles, nous avons les parasitoses intestinales chroniques, telles que la schistosomiase ou bilharziose, qui est une infection parasitaire liée à l'eau. Les filarioses, dont l'onchocercose est l'affection la plus redoutée, en effet elle est la première cause de cécité dans les zones infestées, et la deuxième cause de cécité d'origine infectieuse dans le monde. Les trypanosomiases humaines, qui se rencontrent à l'état endémique sous la forme de la maladie du sommeil, en Afrique. Le choléra, présent à l'état endémique. L'hépatite B, la plus dangereuse des maladies virales du groupe des hépatites, pouvant provoquer une cirrhose du foie susceptible d'entraîner la mort, ou encore un cancer primitif du foie. Et enfin la poliomyélite, qui rend paralytiques de nombreux enfants. Elle est en voie d'éradication, cependant elle continue de sévir encore dans les pays comme l'Égypte, le Nigéria, le Niger, et la Somalie. Pendant longtemps, on avait cru que les maladies non transmissibles ou encore les maladies chroniques non transmissibles, étaient liés à des modes de vie complètement différents de ceux qui prévalaient dans la plus grande partie du continent africain. Aujourd'hui, elles se retrouvent particulièrement liées, en partie, à des modes de vie défavorables à la santé. Alimentation déséquilibrée, manque d'activités physiques, obésité, abus d'alcool et de tabac. Parmi ces maladies on peut citer les cardiopathies, les accidents vasculaires cérébraux, le rhumatisme articulaire aigu, le diabète, le cancer du col de l'utérus et des seins, les maladies respiratoires chroniques etc. Quand bien même peu d'informations fiables sont disponibles, sur l'ampleur et les conséquences du fardeau de morbidité et de mortalité imputables aux maladies non transmissibles, leur fréquence a tendance à augmenter constituant une nouvelle menace. Nombreux sont ceux qui continuent de penser que les maladies cardio-vasculaires frappent essentiellement les personnes aisées et sont dues au processus naturel de vieillissement et de dégénérescence. Les décès par maladies cardio-vasculaires prennent de plus en plus de l'ampleur dans les villes africaines. Cependant, ils sont très peu documentés. L'âge, relativement jeune, auquel les habitants des villes africaines sont affectés, ou meurent, de ces maladies, est devenu une source particulière d'inquiétude. Les causes des maladies cardio-vasculaires sont bien connues. Les principaux facteurs des risques sont l'hypertension, et l'hypercholestérolémie. Avec la mondialisation la nutrition évolue vers des régimes riches en graisses, en sucres, et en sel. Par ailleurs, l'apport d'éléments protecteurs comme les fibres et les substances phytochimiques présentes dans les fruits et les légumes, diminue progressivement. Conjugué au tabagisme et au manque d'exercices physiques, cette alimentation développe l'artériosclérose au sein de la population et entraîne une large distribution des maladies cardio-vasculaires. Les citadins, dans les pays africains, sont en très grande partie exposés au risque de maladies cardio-vasculaires. Faire régresser ces maladies est possible, comme l'ont montré les pays développés. Cela nécessite une prévention, et une prise en charge, appropriées. Ce qui est loin d'être le cas en Afrique. Les cancers constituent un autre facteur de morbidité non moins important pour les pays en développement. Les facteurs de risques les mieux connus sont le tabac et l'alcool ainsi que la surconsommation de certains aliments, comme les graisses animales, alors que d'autres aliments sont protecteurs, tels que les fruits, légumes et fibres. Les cancers les plus courants sont associés à des virus, le cancer du foie au virus de l'hépatite B, celui du col de l'utérus au virus du papillome humain. Quant au diabète, il a été longtemps associé à l'opulence, et à une alimentation de type occidental, et est devenu un problème de santé publique pour les pays africains. Les facteurs sont certainement liés à l'évolution des régimes alimentaires, avec l'urbanisation et l'industrialisation, et le manque de structures de soins à même de dépister le diabète et d'éviter les complications au malade. Le tabagisme est parmi les pratiques néfastes liées à la modernisation. Il est responsable, de manière directe ou indirecte, par simple exposition à la fumée, de nombreux décès ; outre les cancers qu'il provoque, le tabagisme peut être à l'origine des maladies chroniques des voies respiratoires inférieures, dont la bronchite chronique est la plus répandue. C'est une maladie grave, et potentiellement mortelle, par ses complications sous forme d'obstruction des bronches et d'insuffisance respiratoire. Malgré l'adoption, en 2003, par l'Assemblée mondiale de la Santé, de la Convention cadre de l'OMS pour la lutte contre le tabac, rares sont les pays africains qui ont pris toutes les mesures nécessaires pour réduire de manière sensible la consommation du tabac. Les affections liées à l'état nutritionnel représentent une part non négligeable de la charge de morbidité, et sont la cause de nombreux décès, notamment chez les jeunes, dans les pays d'Afrique subsaharienne. L'état nutritionnel est souvent utilisé pour décrire l'état de santé des populations. Un retard de taille par rapport à l'âge, et/ou un retard de poids par rapport à la taille, révèle le contexte environnemental et social, les habitudes alimentaires, et l'accès aux soins préventifs et curatifs. La malnutrition se manifeste par une prévalence élevée de faible poids à la naissance. Le retard de poids par rapport à la taille des nouveaux nés, est un signe de malnutrition aiguë, pouvant entraîner souvent la mort. La sous-alimentation, et la dénutrition, dont souffrent certains habitants des villes africaines, sont souvent aggravées par des carences en micro-nutriments, notamment en iode, en fer, en vitamine A et en zinc. Les traumatismes de tout ordre, intentionnels ou accidentels, avec souvent pour séquelles des invalidités graves, constituent, de plus en plus, une part non négligeable de la charge de morbidité des pays en développement. La principale cause de morbidité, liée aux traumatismes, est constituée par les accidents de la circulation routière. Le bilan commence à devenir lourd pour les villes africaines. En effet, les incapacités et la mortalité, liées aux accidents de la circulation, devraient augmenter, en lien avec le nombre, de plus en plus croissant, du parc des véhicules et de motocycles, si le réseau routier demeure insuffisant, et si les mesures de sécurité ne sont pas imposées aux usagers. Les taux de mortalité des adultes, des femmes et des enfants, sont des indicateurs clés de l'état de santé d'une population et du niveau de développement d'un pays. L'estimation de ces taux de mortalité exige la déclaration complète et exacte des décès d'adultes, des décès maternels et des enfants. Ces estimations pourraient être obtenues par l'intermédiaire de l'État civil, mais cette source d'informations est incomplète dans la plupart des pays africains. Nous nous sommes intéressés, ici, à la mortalité des enfants, en effet, la mortalité infanto-juvénile est un des objectifs du millénaire pour le développement, dont la cible est de réduire des deux tiers, entre 90 et 2015, le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans. Le tableau nous révèle que la probabilité, à la naissance, des décédés avant d'atteindre cinq ans, demeure encore élevé dans les villes africaines. Il se situe au-dessus de la moyenne mondiale qui est de 90 décès pour mille naissances vivantes. [AUDIO_VIDE] Nous pouvons conclure en disant que la santé des populations, notamment urbaines, est une composante importante du développement humain durable. Elle est à la fois une finalité, et un moyen de développement. Certes, la situation sanitaire dans les pays en développement s'est améliorée au cours de la dernière décennie, mais il subsiste encore des inégalités entre régions, entre pays et entre villes. Le problème sanitaire demeure préoccupant, en Afrique subsaharienne notamment. Alors que les maladies infectieuses et parasitaires continuent de toucher bon nombre de citadins, l'émergence des maladies non transmissibles, et de nouveaux risques ne fait que progresser. La forte prévalence du SIDA, la mortalité infantile, etc. constituent autant de défis à relever dans les décennies à venir. Au revoir, et à la prochaine leçon sur environnement physique et santé. [AUDIO_VIDE]