Bonjour. Dans 2 semaines, Olivier vous expliquera comment la résolubilité par radicaux d'une équation polynomiale se traduit par la résolubilité de son groupe de Galois. Galois, lui-même, s'est plus particulièrement intéressé au cas d'un polynôme irréductible de degré premier. Dans ces 2 vidéos, nous allons décrire les sous-groupes transitifs et résolubles du groupe symétrique Sp où p est un nombre premier. Alors, rappelons que le groupe symétrique Sp est le groupe de permutation d'un ensemble à p éléments, et on va changer un peu nos habitudes et prendre pour cet ensemble, 0, 1, 2, jusqu'à p-1. Et rappelons qu'un sous-groupe G de Sp est dit transitif, si quels que soient les éléments i et j de 0, 1, 2, p-1, on a un élément de G envoyant i sur j. Alors, voyons un premier exemple de sous-groupe transitif et résoluble de Sp, qui vous sera familier si vous l'avez traité en exercice lors de la semaine 5. Donc, on note Fp le corps à p éléments et on définit GA(Fp) le groupe des transformations affines sur Fp, donc pour a dans F*p et b dans Fp, on note sigma (a, b) l'application qui à x associe (ax +b). C'est facile de voir que chacune de ses transformations est bijective, donc c'est une permutation des éléments 0, 1, 2, p-1 de Fp, GA(Fp) est un sous-groupe de Sp. Alors dans ce groupe, on a un élément particulier qui est tau qu'on définit comme sigma (1, 1) qui envoie x sur (x + 1), c'est une translation, et elle permet de voir que le groupe est transitif parce que si on prend tau et ses itérés, on arrive à envoyer n'importe quel élément de 0, 1, 2, p-1 sur n'importe quel autre. Le sous-groupe engendré par tau est commutatif et isomorphe à Z/pZ puisque tau est d'ordre p et il est distingué dans le groupe GA(Fp). En effet, l'inverse de sigma (a, b) est sigma (a-1, -a-1 b) et on a que la conjugaison de tau par sigma (a, b) est tau puissance a. De plus, on peut s'intéresser au quotien de GA(Fp) par le sous-groupe engendré par tau et il est isomorphe à (Z/pZ)* en envoyant sigma (a, b) sur a. Donc le groupe Z/pZ est lui aussi commutatif et on voit ainsi GA(Fp) est bien résoluble, puisque l'on a une suite de composition GA(Fp) contenant le sous-groupe engendré par tau, avec quotient commutatif et le sous-groupe engendré par tau est lui-même commutatif. Les 2 résultats suivants sont dus à Galois. Le premier, nous dit que la groupe GA(Fp) et ses sous-groupes transitifs que l'on vient de décrire sont essentiellement les seuls sous-groupes transitifs résolubles de Sp. Énonçons précisément ce théorème : tout sous-groupe transitif et résoluble de Sp est conjugué à un sous-groupe de GA(Fp), c'est-à -dire qu'il est de la forme thêta G thêta^-1 pour G un sous-groupe de GA(Fp) et un certain thêta dans Sp. On en déduira la caractérisation suivante des sous-groupes transitifs résolubles de Sp, c'est notre second théorème, soit G un sous-groupe transitif de Sp alors il est résoluble si et seulement si le seul élément de G ayant 2 points fixes dans l'ensemble (0, 1, 2, p-1) est l'élément neutre. Avant de démontrer ces 2 théorèmes, voyons quels sont les sous-groupes de GA(Fp) qui sont transitifs. Soit G un tel sous-groupe, alors il est automatiquement résoluble puisque c'est un sous-groupe de GA(Fp) qui est résoluble. Puisqu'il est transitif, p va diviser le cardinal de G alors par le lemme de Cauchy, que vous avez vu en exercice lors de la semaine 5, le groupe G va contenir un élément d'ordre p. Dans GA(Fp), les éléments d'ordre p sont tous des puissances de tau, et on voit donc que le sous-groupe engendré par tau est un sous-groupe de G. Ce sous-groupe étant distingué dans GA(Fp), il l'y est aussi dans G et le quotient H de G par le sous-groupe engendré par tau est un certain sous-groupe de (Z/pZ)*. Ce sous-groupe va déterminer G puisque G va être l'image inverse de H par le morphisme de GA(Fp) dans (Z/pZ)* envoyant sigma (a, b) sur a. En terme plus concret, G est composé des éléments sigma (a, b) envoyant x sur (ax + b), pour a dans le sous-groupe H de (Z/pZ)* et où l'élément b de Fp est quelconque. Préparons-nous maintenant à démontrer le premier théorème, soit G un sous-groupe transitif et résoluble de Sp. Il est naturel de vouloir utiliser une suite de composition de G pour conjuguer G à un sous-groupe de GA(Fp) par récurrence. On a pour cela besoin de descendre la propriété de transitivité de G à un sous-groupe distingué de G. On est donc amené au lemme suivant. Soit G un sous-groupe transitif de Sp, tout sous-groupe distingué N de G distant de l'identité est également un sous-groupe transitif de Sp. Alors démontrons ce lemme. Une première étape consiste à montrer que si x et y sont des éléments de notre ensemble à p éléments (0, 1, 2, p-1), alors le cardinal de (Nx) est égal au cardinal de (Ny). Comme G est transitif, on a un élément sigma de G qui envoie x sur y. Alors puisque N est distingué, on a que N est égal à sigma Nsigma^-1 et il en résulte que Ny est égal à (sigma Nsigma^-1) y, est égal à sigma de Nx. Et sigma nous donne donc une bijection entre les ensembles finis Nx et Ny. Deuxième étape, montrons que le cardinal de Nx, dont on vient de voir qu'il ne dépend pas x, est en fait égal à p. Pour cela, on écrit l'ensemble (0, 1, 2, p-1) comme l'union disjointe pour x dans un certain ensemble X lié à x. Alors il faut construire cet ensemble X, on commence par choisir x1 au hasard dans (0, 1, 2, p-1), on le met dans x, on choisit ensuite si possible x2 dans (0, 1, 2, p-1) privé de Nx1, si c'est possible on le met dans X, on continue en choisissant si possible x3 dans (0, 1, 2, p-1) privé de Nx1 union Nx2, etc. jusqu'à vider l'ensemble (0, 1, 2, p-1). Alors en prenant les cardinaux dans cette égalité, on obtient que p, le cardinal de (0, 1, 2, p-1), est égal à la somme sur x dans X du cardinal de Nx, on a vu que cela ne dépendait pas de x, donc si on choisit n'importe quel x0 de X, cette somme est égale au cardinal de X fois le cardinal de Nx0. Comme p est premier, on n'a que deux possibilités pour cette décomposition de p en produit : ou bien X est de cardinal p et alors N fixe chaque élément de (0, 1, 2, p-1) de sorte que N est réduit à l élément neutre ce qui est contraire à notre hypothèse, ou bien X est de cardinal 1 et p est égal au cardinal de Nxo ce qui signifie bien que N est un sous-groupe transitif de Sp. Afin de préparer au premier théorème, démontrons un second lemme. Soit sigma un élément de Sp tel que sigma tau sigma^-1 appartient à GA(Fp) alors sigma est lui-même un élément de GA(Fp). Première étape de la preuve, montrons que sigma tau sigma^-1 appartient au sous-groupe engendré par tau. Donc sigma tau sigma^-1 est un élément de GA(Fp) donc pour un certain a dans F*p et un certain b dans Fp, il envoie x sur (ax + b). Donc si on élève cet élément sigma tau sigma^-1 à la puissance (p-1), on calcule qu'il envoie x sur a^(p-1) x + a^(p-2) + a^(p-3) + etc. + a + 1 fois b, c'est-à -dire sur x + (a^(p-2) + etc. + a + 1) fois b. Raisonnons par l'absurde et supposons que a est différent de 1 dans ce cas, on peut écrire que a^(p-2) + etc. + a + 1 est égal à (a^(p-1)- 1) sur (a- 1), c'est-à -dire 0 dans Fp. On en déduit que sigma tau sigma^-1 à la puissance (p-1) est l'identité de Fp. Et comme c'est aussi sigma tau à la puissance (p-1) sigma^-1, c'est absurde car tau à la puissance (p-1) n'est pas l'identité, c'est donc que a doit être égal à 1 et notre élément sigma tau sigma^-1 envoie donc x sur x + b c'est donc sigma tau sigma^-1 est égal à tau à la puissance b. On est maintenant en mesure d'expliciter sigma, comme tau n'est pas l'élément neutre, b est non nul, ainsi l'égalité sigma tau égal tau à la puissance b sigma peut s'écrire sigma de (x + 1) = sigma (x + b) quel que soit x dans Fp, on calcule donc que sigma de 1 est égal à sigma de 0 plus b sigma de 2 égal sigma 1 + b égal sigma 0 + 2b et ainsi de suite, on voit que sigma de x est égal à bx plus sigma de 0 et sigma est bien un élément du groupe GA(Fp), ce qui termine la preuve du lemme. Dans la vidéo suivante, nous utiliserons ces 2 lemmes pour démontrer le premier théorème et en déduire le second théorème. Au revoir.