[MUSIQUE] [MUSIQUE] Bonjour. Je m'appelle Hilary Wood de Wilde. Je suis psychologue spécialisée dans le domaine de l'autisme. Dans les modules précédents, vous avez appris quels sont les éléments essentiels pour poser un diagnostic. Dans ce module, nous allons parler du moment qui est certainement le plus important pour le patient et qui présente souvent un défi pour le clinicien, le moment où on fait le retour de bilan et on annonce le diagnostic. En effet, c'est le moment où une famille passe du questionnement par rapport au comportement de leur enfant, à la réalité avec laquelle ils doivent avancer. Les parents passent du stade il y a quelque chose de différent chez mon enfant, au stade mon enfant a un diagnostic officiel. Ou dans le cas d'un diagnostic pour un adolescent ou un adulte, c'est un moment de confirmation qu'il est porteur d'une différence, et que cette différence a en fait un nom. Comme nous allons voir dans ce module, le fait de bien mener l'évaluation diagnostique et d'amener les parents à mieux comprendre les différences de leur enfant pendant ce bilan, va rendre le moment du retour plus facile. Par exemple, les évaluations diagnostiques de l'ADOS et de l'ADI qu'on a vues avant dans les autres modules, permettent que les parents soient témoins des difficultés de leur enfant, ainsi que de ses forces. L'un des éléments clés d'une séance de retour réussie est la relation établie avec la famille au cours de l'évaluation de l'enfant. La recherche nous a démontré que le moment de l'annonce diagnostique est un moment que la famille n'oubliera jamais. D'autre part, les études ont montré que la réussite du bilan de diagnostic précoce avait un impact sur l'implication future des parents dans l'intervention précoce de leur enfant. Les parents qui ont une bonne expérience dans le processus diagnostique, étaient en fait plus investis pour aller de l'avant avec un programme d'intervention après. D'où l'importance que ce moment se passe le mieux que possible. Le moment d'annonce pour les parents ou l'individu peut être difficile, mais ça peut également représenter un moment de soulagement, de finalement avoir une réponse à leur questionnement, de pouvoir aller de l'avant. Nous avons demandé à des parents de nous parler de ce moment, et nous les remercions pour leurs témoignages. >> Nous avons demandé à des parents de partager avec nous leur parcours diagnostique de leur enfant. Madame, monsieur, merci beaucoup d'avoir accepté de partager votre témoignage avec nous. Quel a été le rôle de votre pédiatre dans l'établissement du diagnostic de votre enfant? >> Le rôle de notre pédiatre a été vraiment crucial parce que c'est lors d'une visite de routine que tout a basculé. Ou lors d'une discussion, on explique un peu nos inquiétudes par rapport au développement de notre fils et puis, de fil en aiguille, on comprend qu'il y a quelque chose qui ne va pas et que on a un enfant très calme et que en fait ce n'est peut-être pas si normal que ça qu'il soit si calme. Donc, c'est vrai que le rôle de la pédiatre a été essentiel avec ce gros plan de vigilance, le fait qu'il n'y ait pas du tout de langage qui nous a vraiment alerté, et à cela ajouté beaucoup d'autres petits éléments. L'ensemble de ces choses-là a vraiment permis de lancer une alerte. >> Comment ça a été pour vous le moment où finalement ce diagnostic a été clair? Disons le moment où le diagnostic a été clair, et le moment où le diagnostic est devenu vraiment formel, vous avez reçu un rapport médical énonçant le monstre du spectre de l'autisme? >> Le premier rapport où était écrit autisme, notre fils avait trois ans, trois ans et demi à peu près. Alors que la première alerte a été donnée alors qu'il avait 14 mois. Donc entre ces deux étapes, il s'est passé beaucoup de choses dans notre tête et puis dans la prise en charge. Donc finalement le diagnostic officiel, on savait déjà qu'il était autiste. >> Comment ça a été pour vous cette démarche? C'est-à -dire que on sait que beaucoup de parents doivent lutter pour obtenir un diagnostic, et c'est vrai comme vous avez pu le partager avec nous que dans votre cas, vous saviez déjà que votre enfant avait un trouble du spectre de l'autisme et vous avez dû entamer des démarches pour pouvoir vraiment le confirmer. Comment ça a été pour vous ces moments? Qu'est ce qui ont été les éléments importants que vous avez envie de partager avec nous et puis aussi avec les familles et les professionnels qui nous écoutent? >> On va dire qu'on a un point de départ où on comprend qu'il y a un problème. Après on a eu une étape très importante, d'un professionnel quand même qui a évoqué l'autisme même s'il ne l'a pas fait de manière écrite. On a compris que c'était ça, en recueillant des informations de droite à gauche. Et là , on a vraiment du coup réfléchi à comment on allait organiser notre quotidien en fonction de ça, et comment on allait changer un peu notre vie de tous les jours pour que notre enfant fasse des progrès et se développe bien. Et puis après, finalement le diagnostic officiel est venu au moment où il a commencé à dire ses premiers mots. Donc, il y a avait déjà beaucoup de choses qui étaient lancées, qui étaient bien engagées. >> Ce que je veux dire, c'est que c'est très dur d'avoir la première alerte, et il faut du temps pour le digérer. Par contre une fois qu'on a compris et qu'on met en place des choses, en fait là , on reprend le moral parce qu'on voit que c'est utile et qu'on a l'impression d'aider notre enfant. Comme par exemple, le fait qu'il utilise des pictos pour communiquer est très important. Ça c'est quelque chose qu'on a fait, on a suivi une formation, et il a pu de ce fait pouvoir demander des choses. Donc là , c'est à partir de là que c'est beaucoup plus on se sent déjà utile, puis on a l'impression d'aider l'enfant. Ça c'est très important. >> Donc, finalement pour vous ça a peut-être été plus important ce moment-là que le moment où vraiment formellement ce diagnostic a été mis sur papier. >> Dans la vie de notre enfant, oui. Après, dans notre vie à nous, c'est toujours compliqué de passer des épreuves officielles, d'entrer dans une démarche de diagnostic officiel parce qu'il y a des choses qui sont très cadrées, qui sont un petit peu impersonnelles aussi. Donc, ce n'est pas une partie de plaisir. C'est sûr. >> Quand vous dites impersonnelles, vous faites référence à quoi exactement? >> Je sais que nous on a dû par exemple pour faire ces tests, faire de la route. On est allé à une heure et demie de chez nous, donc ça nécessite une certaine organisation avec son enfant. On va dans un lieu qu'il ne connaît pas du tout alors que comme on sait déjà un petit peu des choses sur le fonctionnement de notre enfant, on sait très bien qu'il faut le prévenir au maximum, et que là on est en train de faire quelque chose qu'il ne faut pas, parce que il ne sait pas où il va, il ne sait pas qui il va voir, il ne sait pas combien de temps ça va durer, et c'était un petit peu catastrophique d'arriver aussi mal préparés en quelque sorte. Et puis on est un peu stressés en tant que parents parce que on sait que notre enfant va être scruté, va être observé. On sait aussi que peut-être ce jour-là il ne va pas montrer tous les progrès qu'il a faits jusqu'à présent et que dans notre cas, ça a été compliqué comme moment. >> C'est vrai que pendant ces évaluations, souvent les parents sont présents dans la salle avec l'enfant et le professionnel. Qu'est-ce que vous avez envie de partager avec les professionnels qui se retrouvent comme ça à faire des évaluations avec diagnostic pour des jeunes enfants avec un TSA, que ce soit en présence de l'enfant et aussi parmi les nombreux questionnaires que les professionnels sont amenés à faire passer aux familles? >> Les professionnels, ils savent ce qu'ils ont à faire. C'est très cadré, très précis. Après, au niveau du ressenti des parents, c'est vrai qu'être là , observer et voir son enfant pleurer parce que il n'a pas aimé le bruit du ballon qui se dégonfle ou le bruit d'un appareil, d'un petit jeu mécanique et qu'en gros il y ait le sensoriel qui vienne complètement tout parasiter ce test, c'est un exemple, mais c'est très dur en tant que parent. Se dire, là je vois vraiment de manière très objective que ça ne va pas du tout avec mon fils. Voilà . >> Qu'est-ce que vous avez envie de dire aux professionnels qui nous écoutent et qui sont amenés à faire ce type d'évaluation? Un conseil de parent. >> C'est vrai que si on peut préparer en amont, ne serait-ce que avoir un petit dépliant pour expliquer ce qui va se passer, combien de temps ça va durer, en fait des choses assez précises, pour peut-être que les parents puissent se préparer et préparer leurs enfants en conséquence, je pense que ce serait une bonne chose. Et puis, c'est un conseil général, être bienveillant et pas dans le jugement. C'est vrai que quand on est parent, on se sent forcément un peu jugé lors de ces tests. C'est un peu bizarre de dire ça. C'est l'enfant qui est évalué, mais ça fait souffrir aussi le parent ces moments-là . >> Est-ce que monsieur, vous avez aussi envie d'ajouter quelque chose par rapport à ça? >> L'autisme c'est complexe, donc c'est vrai qu'il y a beaucoup de méthodes qui existent. On est très rapidement perdu, surtout quand il y a différents professionnels qui n'ont pas la même vision. Donc ça c'est assez dur à gérer. Donc c'est important qu'on puisse constituer comme une équipe qui englobe les professionnels et les parents pour aider en fait à aller vers le meilleur chemin. >> Aussi, vous touchez le point de la formation des professionnels dans le domaine aussi. >> Oui, c'est vrai qu'on voit que tous ne sont pas formés au même stade, et puis ça, je pense qu'il faut l'améliorer. >> Ça c'est vrai, je rajoute aussi, c'est quelque chose de très important aussi d'être en contact avec des professionnels qui connaissent vraiment l'autisme parce que c'est très insécurisant pour des parents de voir que peut-être le professionnel n'est pas bien en accord avec ce que la science dit, etc. On a aussi besoin d'être rassuré avec des gens vraiment très bien formés. >> D'accord. [MUSIQUE] Merci beaucoup pour ce témoignage. [MUSIQUE] [MUSIQUE]